Côte d’Ivoire : un an après l’attentat de Grand-Bassam, où en est l’enquête ?
Le 13 mars 2016, la cité balnéaire
de Grand-Bassam était frappée par un attentat faisant 19 morts. Un an après,
Jeune Afrique fait le point sur l'enquête.
Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) avait très vite revendiqué l’attaque
du 13 mars, détaillant l’identité de trois terroristes : Hamza al-Fulani, Abou
Adam al-Ansari et Abdul Rahman al-Fulani. Le 16 mars, la branche média du
groupe terroriste diffusait les photos des trois assaillants, précisant que les
deux premiers étaient issus des rangs de son allié Al-Mourabitoune, le
mouvement dirigé par l’Algérien Mokhtar Belmokhtar. Un duo (Al-Mourabitoune
ayant prêté allégeance à Aqmi en décembre 2015) qui avait déjà frappé à
Ouagadougou deux mois plus tôt.
38 arrestations
« Les enquêtes ont conduit aujourd’hui à l’arrestation de 38 personnes en
tout ; dont 26 en Côte d’Ivoire, 6 au Burkina Faso, 4 au Mali et 2 récemment au
Sénégal », a déclaré le porte-parole du gouvernement. Parmi les personnes
arrêtées figurent des terroristes impliqués au plus haut niveau dans la
planification de l’attaque.
Mimi Ould Baba Ould Cheick, par exemple, intercepté le 12 janvier par les
militaire français dans le nord du Mali. Connu dans cette région, « il est allé
un moment en Algérie. Il est revenu à Gao, avant de prendre ses quartiers à
Gossi. C’est lui qui a mobilisé les hommes, les moyens, le plan pour attaquer
Grand-Bassam », relate une source sécuritaire malienne citée par l’AFP.
Le ministère de l’Intérieur ivoirien dit de lui qu’il « apparaît dans la
hiérarchie supérieure de ce groupe comme l’un des cerveaux impliqué à un très
haut niveau ». « Il aurait reconnu avoir organisé l’attaque », assure William
Assanvo, chercheur principal au bureau de Dakar de l’Institut d’études de
sécurité (ISS).
Arrêtés au Mali en mars et avril 2016, Ibrahim Ould Mohamed et Alou
Doumbouya, alias « man », sont respectivement présentés comme le chauffeur et
bras droit de Kounta Dallah et l’homme qui a convoyé du Mali en Côte d’Ivoire
les armes ayant servi à l’attaque.
Enfin, dernièrement, la police sénégalaise a annoncé avoir arrêté deux
hommes en lien avec les attentats de Grand-Bassam. L’un deux aurait été en
contact avec Ould Nouini, présenté par la police comme « le planificateur » de
l’attaque. Problème : c’est la première fois depuis le début de l’enquête que
le nom d’Ould Nouini est mentionné.
Deux soldats ivoiriens condamnés
En août 2016, les sergents Zanga Zoumana Coulibaly et Brice Touré ont été
reconnus coupables de « violation de consignes » et « association de
malfaiteurs » par le tribunal militaire pour avoir rencontré Assane Barry, dit
« Sam », l’un des suspects de l’attentat de Grand-Bassam.
« On leur reproche d’avoir cohabité avec ces personnes, d’avoir échangé
avec le chauffeur (du commando jihadiste). Ils disent qu’ils ne savaient pas
que c’était des jihadistes. On leur répond: ‘Vous auriez dû savoir’ « , avait
expliqué le procureur militaire, Ange Kessi.
Kounta Dallah toujours en fuite ?
Très vite, Kounta Dallah est présenté comme le cerveau de l’attaque de
Grand-Bassam. « Il serait plutôt l’un des chefs de l’opération sur le terrain,
pas le cerveau », estime William Assanvo. En mai 216, un officier malien
confiait à Jeune Afrique que Dallah serait plutôt « un ami du cerveau, un genre
de mercenaire, mais pas un jihadiste », « plutôt un homme qui a fait des
repérages et a aidé à préparer l’attaque ».
Jusqu’à la tuerie du 13 mars, ce Malien de 40 ans était inconnu des
services de renseignements. Il serait rentré au Mali après les faits en
empruntant un vol régulier Abidjan-Bamako.
Né dans le Gourma, une vaste zone de pâturages située dans la région de
Tombouctou, il a grandi dans une famille maraboutique sans histoire. Il
s’installe en Côte d’Ivoire en 1996, précisément à Bouaké, où il gère la
boutique d’un commerçant mauritanien, sans jamais se faire remarquer. En 2000,
il retourne au Mali, dans la région de Mopti, et se lance dans le commerce du
bétail, mais, toujours selon cet officier, se rend régulièrement en Côte
d’Ivoire.
En 2012, la crise politico-militaire qui frappe le Mali le contraint à
l’exil au Burkina. Quand il revient au pays, les jihadistes d’Ansar Eddine et
du Front de libération du Macina, d’Hamadoun Koufa, ont pris leurs aises dans
les régions de Mopti et de Tombouctou. C’est à ce moment-là qu’il noue des
contacts avec les mouvements salafistes. Suite sur...jeuneafrique.com/