‘Affaire véhicules immatriculés frauduleusement’: Doutes sur le niveau des préjudices subis par l’Etat
Le procureur de la République Adou Richard et le Dg des douanes, le Colonel Pierre Alphonse ne sont pas sur la même longueur d’onde dans le scandale des véhicules immatriculés frauduleusement au Guichet unique automobile,( Gua) d’ Abidjan. Précisément en ce qui concerne le niveau du préjudice subi par l’Etat de Côte d’Ivoire. Dans cette affaire, c’est le Dg des douanes qui le premier face à la presse a affirmé qu’il y a « un manque à gagner de 10 à 15 millions Fcfa, par véhicule », soit au moins 10 milliards Fcfa. Pendant que quelques jours plus tard, que le procureur Adou Richard à son tour face à la presse, a estimé que le préjudice subi par l’État porte sur plus d’un millier de véhicules, s’élève à 2 à 3 milliards de Fcfa. Mais que cache ces différentes sorties et différences au niveau des chiffres servi aux petits contribuables ivoiriens très préoccupés par la satisfaction de sa pitance au quotidien. Parlant de ce scandale, Adou Richard du Plateau dit que « la fraude a été découverte par la douane » dont le Directeur général, le colonel Pierre Alphonse Da, est alerté vers la fin du mois de mars 2018, par un membre du gouvernement sur des activités suspectes au Guichet unique automobile (Gua) d’Abidjan. Il donne instruction à ses services afin qu’ils lui présentent rapidement un rapport. La réaction du patron des douanes ivoiriennes ne se fera pas attendre comme le Colonel Da Pierre lui-même le confie au site d’information en ligne www.jeuneafique.com. Il dit à ce confrère en ligne : « Mes services ont constaté des incohérences entre les données du Système de dédouanement automatisé (Sydam) et celles du système informatique du Guichet unique automobile, explique Da. En effet, certains véhicules importés n’apparaissaient pas dans les fichiers sur les véhicules dédouanés, c’est-à-dire ayant acquitté les droits et taxes de douane. » Est commandé par la suite une enquête plus fouillée à la Direction des enquêtes douanières. L’objectif étant d’identifier les auteurs et co-auteurs de la fraude et de découvrir leur mode opératoire. A l’issue de plusieurs jours d’investigation, l’étau se resserre autour de Mamadou Fofana, directeur du Gua d’Abidjan, considéré par les enquêteurs comme le cerveau de la fraude, et de plusieurs cadres intervenant dans la chaîne d’immatriculation des véhicules neufs et d’occasion. Selon le colonel Da, « le mode opératoire utilisé par les auteurs des actes d’immatriculation frauduleuse des véhicules neufs a consisté à contourner la procédure normale, tant au niveau informatique qu’au niveau de la transmission physique des dossiers par l’utilisation de faux documents, l’utilisation de fausses déclarations ou l’absence de déclarations, l’extraction de dossiers du circuit et la manipulation des données informatiques ». Si l’on peut se féliciter du travail abattu par les fins limiers des douanes, l’on est en droit de s’interroger tout de même sur le scandale en question porte sur « plus d’un millier de véhicules » qui visiblement ne seraient pas sortie du dispositif du guichet unique automobile en un jour voire même un mois. S’il existe une mafia dans la filière de dédouanement des véhicules en question, elle doit être certainement bien organisée et elle a su profiter de certaines faiblesses en termes de transparence des procédures en douane et, plus généralement, dans l’administration ivoirienne, et qui a su exploiter également l’absence de contrôles en amont et de vérification en aval. Au lieu de faire porter le chapeau ‘aux seconds couteaux’ comme c’est bien le cas depuis quelques en Côte d’Ivoire, en tout cas sous le Régime de la Reconstruction, les ivoiriens osent croire que pour une fois, l’enquête doit aller jusqu’au bout pour faire toute la lumière. Que la Direction générale des douanes comme elle l’a fait sous le Régime de la Refondation, lève un coin de voile sur les propriétaires des véhicules en question ou alors engage un processus de redressement des fraudeurs pour que l’Etat puisse recouvrer une partie de ses droits et taxes. Le colonel Pierre Alphonse Da pourra faire comme Gnamien Konan alors Directeur général des Douanes ivoiriennes ? « Il nous souvient que courant 2005, face à une telle situation, Gnamien Konan avait fait publier non seulement liste des véhicules concernées mais, il les avait fait immobiliser et les propriétaires convoqués à venir dédouaner. Au nombre des concernés ont notait des intouchables du Régime d’alors » se souvient un haut cadre des douanes ivoiriennes. Faire éclater la transparence dans un contexte social marqué par des demandes de partage des fruits de la croissance économique de plus en plus pressantes, alors que la population soupçonne les élites de s’enrichir rapidement ou illicitement, les responsables actuels des douanes auront frappé un grand coup. En attendant, dix-huit personnes ont interpellées ont et déférées devant le parquet, début mai. Elles séjournent depuis lors à la Maison d’arrêt et de correction d’Abidjan (Maca) dans l’attente de leur jugement. Au moins quatre chefs d’accusation sont retenus contre elles : « faux et usage de faux en écritures douanières et de banque », « importation sans déclaration douanière », « détournement de deniers publics » et « blanchiment de capitaux ».
Bamba Mafoumgbé, bamaf2000@yahoo.fr